Biden lève les brevets ! Des vaccins pour les peuples, pas pour les profits

Par Frank Prouhet 

Animateur de la pétition Brevets sur les vaccins anti-covid, Stop. Réquisition !

Joe Biden a décidé de soutenir « la demande de levée temporaire des protections de la propriété intellectuelle pour les vaccins contre le coronavirus ». Une exigence formulée devant l’Organisation Mondiale du Commerce depuis octobre 2020 par l’Afrique du Sud et l’Inde, rejointe par des centaines de gouvernements de pays pauvres et d’organisations de la société civile. Une surprise et une victoire pour les activistes du monde entier qui manifestaient, avec Free Vaccine et Bernie Sanders à Washington aux cris de « des vaccins pour le peuple, pas pour les profits » jusqu’au Pakistan avec People’s Rights Movement, contre ce scandale absolu. Une pandémie qui fait 3,3 millions de morts. Des vaccins efficaces à plus de 95% contre les formes graves du covid, financés à coup de milliards d’argent public, les USA pour 15 milliards, l’UE pour 2,5 milliards… Mais les peuples, notamment des pays pauvres, privés de vaccins pour cause de brevets, de pénurie et de prix hauts. USA 45% de vaccinés, mais l’Inde qui produit des vaccins pour le monde entier et fait face à une terrible deuxième vague 9,7%. L’Afrique du Sud, qui produit les vaccins Jansen, seulement 0,6% ! Les pays capitalistes avancés, qui comptent 15% de la population mondiale, réservent 95% des vaccins à ARN. Apartheid vaccinal.

Les USA ont imposé, dans les années 90, la défense de la propriété intellectuelle à l’OMC, responsable de millions de morts, notamment du VIH. Biden a reçu 3,3 millions de dollars de l’industrie pharmaceutique pour sa campagne. Après 6 mois de refus et des centaines de milliers de morts supplémentaires, il ne faut pas l’oublier, ils ont du plier face à la pression des activistes, la tribune de la prestigieuse revue Nature, les appels du pape, d’une centaine d’anciens présidents et de prix Nobel. Mais il s’agit aussi d’un arbitrage entre les différents secteurs du capitalisme. Protéger les brevets du capitalisme vaccinal, sa profitabilité à 25%, et limiter la vaccination aux pays les plus riches? Avec le risque d’un blocage prolongé de l’aérien, du tourisme, du commerce mondial, des profits, dans une économie globalisée. Sans parler du risque d’un nouveau variant qui rendrait les vaccins inefficaces. Une menace bien réelle avec une puissante deuxième vague en Inde, l’usine à vaccins du monde, qui réduit ses livraisons pour y faire face, mais aussi faute de travailleurs. Comme la Chine au début de la crise de la covid. Privilégier la rente de situation de Big Pharma ou arbitrer en faveur des intérêts plus généraux du capitalisme. Selon la Chambre de commerce internationale, le fait de laisser les pays en développement sans vaccins coûtera aux pays riches 4500 milliards de dollars en perte de revenus cette année. La défaite de Trump a tranché. Macron, qui par trois fois s’était opposé à la demande de suspension des brevets à l’OMC, a du suivre.

L’industrie pharmaceutique est vent debout contre cette proposition, pour défendre la rente de situation crée par ses brevets. Ainsi Pfizer engrange 20 milliards de dollars de commandes pour 2021, Moderna 18,4 milliards. Pour éviter de créer un précédent, qui pourrait valoir lors d’autres pandémies, ou pour rendre enfin accessible aux peuples du monde entier les traitements anti-cancers, ou anti-hépatites C, dont les prix explosent. On pense au Sovaldi de Gilead, qui coûte à peine 100 euros à fabriquer par traitement. Mais qui est facturé 24894 euros à la Sécurité Sociale et donc à nos cotisations, grâce au brevet d’exclusivité de 20 ans ! Vent debout aussi Big Pharma, pour éviter les transferts de technologie à ARN, utilisable pour d’autres vaccins très rentables, renouvelés chaque année, comme les vaccins anti-grippaux, ou utilisable demain pour ouvrir de nouveaux champs thérapeutiques ultra-rentables contre les cancers. Plus de vaccins disponibles, c’est une baisse des prix assurée. Alors qu’avec la pénurie, Pfizer peut au contraire les augmenter, dans le plus grand secret.

Mais comme ces arguments n’étaient pas très sexy, il a fallu en inventer un autre. Au pays du mensonge de Big Pharma, « les brevets ne sont pas le problème. Le problème, ce sont les capacités de production ». Teva, Moderna et Sanofi disent pourtant le contraire. Teva, c’est le numéro un mondial des génériques. Kare Schulz, le Pdg de la société israélienne, a révélé avoir approché les laboratoires détenteurs de brevets de vaccins à ARN, pour acheter des licences et produire dans ses usines aux USA et en Europe. Refus des labos qui ont «déclaré avoir assez de capacité de production» ! Aucune envie des Big Pharma de partager les technologies à ARN avec un futur concurrent. Et de redresser les comptes du génériqueur en chef. Teva a en effet dû bloquer d’énormes provisions pour de futurs procès aux USA, pour son implication présumée dans la crise des opiacés et pour entente sur les prix de certains médicaments, avec à la clef des hausses de prix de 1000%. Bienvenue dans le monde merveilleux du capitalisme pharmaceutique!

Moderna était une petite société de biotechnologie sans aucune capacité de production industrielle. Son usine de Norwood dans le Massachusetts était à peine capable de fournir les doses pour ses essais cliniques. En avril 2020, Moderna reçoit 483 millions de dollars d’argent public étatsunien pour construire une usine de production. Mais le premier mai 2020, elle préfère passer contrat avec le groupe suisse Lonza. Qui n’a jamais produit un seul vaccin à ARN ! Lonza réaménage deux usines existantes, à Viége en Suisse et à Portsmouth, dans le New Hampshire. Grace aux transferts massifs de technologies, en deux mois son usine de Portsmouth est lancée en fabrication commerciale. Et celle de Viége, après 210 millions d’investissements, produit maintenant 6 millions de doses par semaine, et compte produire 300 millions de doses en 2021. Sanofi produit des dividendes, 3,8 milliards l’an passé, mais pas de vaccin. Face à ce scandale, elle se résout… à mettre en flacon les vaccins des autres ! Alors que selon les syndicalistes de Sanofi, elle possède dans deux de ses usines au moins des enceintes au froid, qui pourraient assez facilement produire des vaccins à ARN, et pas seulement les mettre en flacon. Alors forçons les à transférer les technologies et imposons la réquisition des capacités de production.

Une première barrière est donc tombée avec la décision de Biden. En mai, un nouveau round s’ouvre à l’OMC. Il faudra l’unanimité pour lever les brevets. Et notre mobilisation pour l’imposer. Et vite, et pas pays par pays. Mais ce n’est que le premier pas. Nous devons forcer Big Pharma à partager ses technologies, et pas seulement ses brevets. Big Pharma qui avaient refusé de coopérer au pool d’accès aux technologies Covid 19 de l’OMS. Le Pdg de Pfizer avait même parlé d’un non-sens ! Suspension des brevets, transfert des technologies, réquisition sous contrôle social de l’industrie pharmaceutique, notre mobilisation continue « pour un accès immédiat, effectif, universel et gratuit à ces biens communs que sont les vaccins anti covid » comme le réclame l’Appel brevets sur les vaccins anti-covid Stop. Réquisition ! Le code génétique du covid 19 est public, ce sont les subventions publiques qui ont financé la recherche. Ce sont nos vaccins et pas leurs brevets. Associés à une politique de santé communautaire, qui vise à construire les gestes barrières et les campagnes de tests avec et pour les populations, notamment les plus fragilisées, les vaccins biens communs sont le seul espoir de sauver des vies, de diminuer la pression de sélection de variants d’échappement au vaccins, d’en finir avec les pénuries, les prix hauts et l’apartheid vaccinal, pour reprendre du pouvoir sur nos vies, et faire reculer cette pandémie. 

Biden lifts the patents…

Vaccines for the people, not for profits!

By Frank Prouhet

Joe Biden has decided to support “the demand for the temporary lifting of intellectual property protections for coronavirus vaccines”. A demand formulated before the World Trade Organization since October 2020 by South Africa and India, joined by hundreds of governments of poor countries and civil society organizations. A surprise and a victory for activists from all over the world who demonstrated, with Free Vaccine and Bernie Sanders in Washington shouting “vaccines for the people, not for profits” to Pakistan with the People’s Rights Movement, against this absolute scandal. A pandemic that causes 3.3 million deaths. Vaccines that are more than 95% effective against severe forms of covid, financed with billions of public money, the USA for 15 billion, the EU for 2.5 billion… But the people, especially in poor countries, are deprived of vaccines because of patents, shortages and high prices. USA 45% of vaccinated, but India which produces vaccines for the whole world and faces a terrible second wave 9.7%. South Africa, which produces Jansen vaccines, only 0.6%! The advanced capitalist countries, with 15% of the world’s population, reserve 95% of RNA vaccines. Vaccine apartheid.

The USA imposed in the 90s the defense of intellectual property at the WTO, responsible for millions of deaths, including HIV. Biden received 3.3 million dollars from the pharmaceutical industry for his campaign. After 6 months of refusal and hundreds of thousands of additional deaths, we must not forget that they had to bow to the pressure of activists, the tribune of the prestigious journal Nature, the appeals of the Pope, of a hundred former presidents and Nobel Prize winners. But it is also a question of arbitration between the different sectors of capitalism. Protecting the patents of vaccine capitalism, its 25% profitability, and limiting vaccination to the richest countries? With the risk of a prolonged blockage of air travel, tourism, world trade and profits in a globalized economy. Not to mention the risk of a new variant that would make vaccines ineffective. A very real threat with a powerful second wave in India, the world’s vaccine factory, which is reducing its deliveries to cope with it, but also because of a lack of workers. Like China at the beginning of the covid crisis. Favouring Big Pharma’s rent or arbitrating in favour of the broader interests of capitalism. According to the International Chamber of Commerce, leaving developing countries without vaccines will cost rich countries $4500 billion in lost revenue this year. Trump’s defeat decided the issue. Macron, who had three times opposed the request to suspend patents at the WTO, had to follow.

The pharmaceutical industry is up in arms against this proposal, in order to defend the income created by its patents. Thus Pfizer has 20 billion dollars in orders for 2021, Moderna 18.4 billion. To avoid creating a precedent that could be used for other pandemics, or to finally make anti-cancer or anti-hepatitis C treatments, whose prices are exploding, accessible to people around the world. One thinks of Gilead’s Sovaldi, which costs barely 100 euros to manufacture per treatment. But it is invoiced at 24894 euros to the Social Security and therefore to our contributions, thanks to the 20-year patent exclusivity! Big Pharma also wants to avoid the transfer of RNA technology, which can be used for other very profitable vaccines, renewed every year, such as flu vaccines, or used tomorrow to open up new ultra-profitable therapeutic fields against cancers. More available vaccines means lower prices. Whereas with the shortage, Pfizer can on the contrary increase them, in the greatest secrecy.

But since these arguments were not very sexy, another one had to be invented. In the land of Big Pharma lies, “patents are not the problem. The problem is production capacity. Teva, Moderna and Sanofi say otherwise. Teva is the world’s number one generic company. Kare Schulz, the CEO of the Israeli company, revealed that he had approached laboratories holding RNA vaccine patents to buy licenses and produce in his factories in the USA and Europe. The labs refused, saying they “had enough production capacity”! Big Pharma has no desire to share its RNA technologies with a future competitor. And to straighten out the accounts of the generic company in chief. Teva had to block huge provisions for future lawsuits in the US, for its alleged involvement in the opiate crisis and for price fixing on certain drugs, with price increases of 1000%. Welcome to the wonderful world of pharmaceutical capitalism!

Moderna was a small biotech company with no industrial production capacity. Its plant in Norwood, Massachusetts was barely able to supply the doses for its clinical trials. In April 2020, Moderna received $483 million in U.S. taxpayer money to build a production facility. But on May 1, 2020, it chose to contract with the Swiss group Lonza. Which has never produced a single RNA vaccine! Lonza is redeveloping two existing plants, in Viége, Switzerland and Portsmouth, New Hampshire. Thanks to massive technology transfers, the Portsmouth plant went into commercial production within two months. And the Viége plant, after a $210 million investment, is now producing 6 million doses per week, and expects to produce 300 million doses by 2021. Sanofi produces dividends, 3.8 billion last year, but no vaccine. Faced with this scandal, it has decided to bottle other people’s vaccines! But according to Sanofi’s trade unionists, it has at least two factories with cold chambers that could easily produce RNA vaccines, and not just bottle them. So let’s force them to transfer the technologies and impose the requisition of production capacities.

So a first barrier has fallen with Biden’s decision. In May, a new round of negotiations will begin at the WTO. Unanimity will be needed to lift the patents. And our mobilization to impose it. And quickly, and not country by country. But this is only the first step. We must force Big Pharma to share its technologies, not just its patents. Big Pharma who refused to cooperate with the WHO Covid 19 technology access pool. The CEO of Pfizer even called it a nonsense! Suspension of patents, transfer of technologies, requisition under social control of the pharmaceutical industry, our mobilization continues “for an immediate, effective, universal and free access to these common goods that are the anti-covid vaccines” as demanded by the Patent Appeal on anti-covid vaccines Stop. Requisition! The genetic code of covid 19 is public, it is public subsidies that have financed the research. These are our vaccines, not their patents. Associated with a community health policy, which aims at building barrier actions and testing campaigns with and for the populations, especially the most vulnerable ones, common property vaccines are the only hope to save lives, to decrease the selection pressure of vaccine escape variants, to end shortages, high prices and vaccine apartheid, to regain power over our lives, and to roll back this pandemic

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