2 juillet 2019
Après des centaines de postes supprimés en Europe par les plans de restructuration des activités industrielles, commerciales et fonctions supports en cours : Convergence, Horizon 2020, SCCOPE, la Direction du Groupe Sanofi informe le Comité d’Entreprise Européen d’un nouveau projet d’organisation de la Recherche & Développement en Europe. La Direction justifie la restructuration de son activité de recherche et développement comme un «recentrage de ses efforts d’innovation vers ses aires thérapeutiques les plus stratégiques».
En 20 ans, ce qui constituait le fleuron de la recherche pharmaceutique française et européenne (Hoechst, Roussel-Uclaf, Rhône-Poulenc, Aventis, Sanofi, Synthélabo, Delagrange, Delalande, Zentiva, Chinoin,…) a été presque entièrement démantelé.
En France, de 17 centres de R&D il y a 20 ans, il n’en reste plus que 5. Par rapport aux multiples axes de recherche qui étaient travaillés en France, il n’en resterait plus que trois : oncologie, immuno-oncologie et vaccins. L’Allemagne connaît une situation comparable à celle de la France, alors qu’en Hongrie, Italie, Espagne et Royaume-Uni, les activités de R&D ont totalement disparu.
Voici quelques exemples récents des orientations dites «stratégiques» de Sanofi qui s’accompagnent de suppressions d’emplois et de perte d’expertises :
° Novembre 2018 : une réorganisation est annoncée dans les fonctions commerciales en Italie : 75 postes supprimés.
° Décembre 2018 : une réorganisation est annoncée dans les fonctions support: 700 postes supprimés en France, 142 en Allemagne.
° Décembre 2018 : un projet de transfert de salariés vers le sous-traitant informatique Cognizant est annoncé dans certains métiers de l’informatique : 80 postes supprimés en France.
° Mars 2019 : une réorganisation est annoncée dans les fonctions commerciales : 640 postes supprimés en Europe, principalement en France et en Allemagne.
° Mars 2019 : une réorganisation est annoncée dans la Supply Chain : 100 postes supprimés en Europe.
° Mars 2019 : délocalisation vers Barcelone des fonctions centrales de la Supply Chain : 12 personnes impactées.
° Avril 2019 : délocalisation de certaines fonctions support vers la Hongrie et externalisation.
° Juin 2019 : une réorganisation est annoncée en R&D : 299 postes supprimés en France et 168 en Allemagne.
Rappelons aussi la vente de Zentiva à Advent International avec environ 2500 postes supprimés en Europe au 2ème semestre 2018.
Mais il n’y a pas que des suppressions et des délocalisations, il y a aussi les allers-retours dans les choix des aires thérapeutiques :
A) Recherche Anti-infectieuse Antibactérienne, Antifongique, Antivirale :
– Abandon en 2002 à la suite de l’OPA de Rhône-Poulenc sur Roussel-Uclaf.
– Reprise d’une recherche dans cet axe à Toulouse en 2008 dans Sanofi suite à nos arguments pour développer cet axe répondant à des besoins majeurs dans de nombreux pays.
– Décision de Sanofi de vendre les activités scientifiques de Toulouse en 2013, l’axe anti-infectieux est transféré à Lyon où, affirme la Direction, il y aura des synergies avec Sanofi Pasteur. Environ 80 salariés sont transférés de Toulouse, Montpellier et Vitry en 2014-2015.
– Décision en 2018 de se séparer de cet axe de recherche comprenant une centaine de salariés par une vente à l’entreprise Evotec, avec pour argument que les anti-infectieux ne sont plus une priorité pour Sanofi.
B) Recherche en Diabète et Cardio-Vasculaire :
– Fermée en 2010 à Toulouse.
– Réintroduite en 2015 à Chilly-Mazarin après l’acquisition d’une molécule.
– Abandonnée à nouveau en 2019.
C) Recherche en Neurologie :
– Recentrages sur des maladies neuro-dégénératives rares et abandon de tous les autres axes de recherches.
D) Recherche en Oncologie :
– Arrêt de la recherche à Montpellier en 2010, recentrage uniquement sur Vitry.
– Sanofi annonce vouloir se recentrer sur cet axe en 2019 alors que les expertises de 2010 ont disparu.
Et tout cela se passe dans un Groupe qui a fait en 2018 un chiffre d’affaires de 34,5 milliards d’euros et un bénéfice de 6,8 milliards d’euros, Groupe qui se félicite de sa Responsabilité Sociale d’Entreprise (RSE) !
Ces restructurations sont d’autant plus inacceptables que Sanofi perçoit chaque année entre 120 et 130 millions d’euros de crédit d’impôt du gouvernement français, normalement pour développer la recherche en France et les collaborations en France et en Europe. Où est l’éthique de Sanofi quand cet argent est utilisé pour financer les plans de restructuration et saborder sa R&D?
Outre le côté scandaleux d’un point de vue moral, il est alarmant de constater qu’avec l’externalisation à outrance, Sanofi se met soi-même en danger vis-à-vis du devoir de vigilance.
Nous, élus du Comité d’Entreprise Européen, demandons l’arrêt de ces plans massifs de suppressions de postes et de perte de compétences. Nous considérons que ces orientations stratégiques erratiques menacent sérieusement l’emploi pour l’ensemble des sites et des activités en Europe aussi bien en R&D que dans l’industriel.
Ces désengagements de Sanofi représentent un danger pour notre responsabilité sociale en matière de santé publique.