Colloque: Scandales sanitaires, scandale démocratique (Assemblée nationale)

Colloque organisé par François Ruffin, député de la première circonscription de la Somme, Co-présidé par Gérard Bapt, député honoraire, médecin. Jeudi 26 septembre 2019

Pour une appropriation citoyenne active et solidaire de la Santé.

La Déclaration Universelle des Droits de l’Homme, adoptée par l’Assemblée Générale de Nations Unies le 10 Décembre 1948, reconnaît dans son article 25 un droit à la Santé et à la Protection Sociale. Ce Droit comporte de nombreuses composantes de notre quotidien. A la qualité du logement ou de la nourriture s’ajoute celui qui nous réunit aujourd’hui : la Santé. L’une des conditions du plein exercice de ce Droit Humain Universel est donc le total accès aux médicaments comme aux autres modes de soins qu’ils soient de routine ou d’urgence. Le médicament, par sa quotidienneté, y occupe une place de 1er plan. Place qui va croissant aux deux extrémités de la vie: en raison, par exemple, du passage à la chronicité d’affections, mortelles à 100%,  jusqu’à ces dernières décennies ; en raison aussi de l’extension d’affections liées aux pollutions aériennes urbaines telle la croissance régulière de l’asthme infantile. Dépendant jusqu’à 1994 de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) le médicament, à cette date, est passé sous la houlette de l’Organisation Mondiale du Commerce (l’OMC). Transformé en «marchandise» le médicament voisine avec les pompes à vélo ou les chevaux de course dans le Traité commercial dit TAFTA, voté en Juillet dernier. Son prix, donc son accessibilité, dépend alors de décisions commerciales où la spéculation trouve toute sa place. Il devient alors moteur d’inégalités DANS les peuples comme ENTRE les peuples (Inégalités dont un rapport du Bureau International du Travail (BIT) de Juillet 1944 soulignait le rôle dans le déclenchement des conflits armés). Ce qui signifie que, via le prix du médicament, c’est la survie de 7 Mds d’humains que détiennent entre leurs mains quelques dizaines d’hommes installés au faîte de quelques multinationales par la seule légitimité de leurs capitaux personnels. Capitaux accumulés, pour l’essentiel, grâce aux cotisations sociales payées par les millions de cotisants malades et bien portants, solidaires entre eux. A aucun moment, ceux-ci, premiers concernés, ne sont admis à participer aux décisions qui peuvent concerner jusqu’à leur survie.

N’y a-t-il pas, ici, une contradiction irréductible entre décision financière d’une poignée de dirigeants et absence de consultations de millions d’humains pourtant directement concernés, pourtant cotisants mais aucunement consultés? Cette question s’adresse à SANOFI, comme à Merck/Sharp/Dome ou Novartis et autres, ci-après désignés : les Big-Pharma.

Les Big-Pharma détiennent le monopole du marché du médicament principalement grâce aux droits du Brevet d’Invention appliqué aux médicament-marchandise, droit légitimé fort à propos par l’OMC. Le Brevet donne aux Big-Pharma l’exclusivité de la production et de la commercialisation du produit, le médicament, pour une période de 20 ans. Le brevet leur confère une position de domination dont elles usent pour imposer leur prix de vente aux gouvernements. Cette position de domination de Big-Pharma met en lumière les moyens réels et la motivation principale des pénuries organisés en France et en Europe: pénuries multipliées par 20, comme vous le savez, entre 2008 et 2018. Par ailleurs, l’Etat se désengageant de plus en plus de la recherche publique, ces multinationales, assises sur leurs réserves financières, assujettissent l’organisation et les orientations de la recherche fondamentale à leur avantage. Seuls sont conservés les domaines jugés les plus profitables. Multinationales, elles n’hésitent pas à piller, pour les breveter à leur profit exclusif, la connaissance millénaire de phytomolécules efficaces des indiens d’Amazonie ou ces habitants de Madagascar ou d’Afrique. La santé de tous, finalité et justification initiales des laboratoires a disparu. La volonté de conquérir les «marchés émergents», celui de la Chine en 1er lieu, est LA priorité. Ce n’est plus la santé des hommes.

L’EXEMPLE DE SANOFI : Comme les autres Big-Pharma, depuis 15 ans environ, SANOFI, priorise finance et dividendes au détriment des investissements internes. En 2017, SANOFI verse à ses actionnaires en Mds€ sous forme d’action ou rachats d’actions, en hausse de 15% sur 2017

 SANOFI se désengage ou ferme des Centres de Recherche :

A Romainville, (93) ou à Toulouse (31). SANOFI supprime des axes de recherche comme celui des anti-infectieux au moment où la résistance croissante aux antibiotiques rend possible une crise sanitaire mondiale. Par ses choix, SANOFI menace l’indépendance médicamenteuse de notre pays : en effet, en 2019, ne restent en France, que 4 Centres de Recherche sur les 15 en activité en 2001. Sur la vingtaine d’Axes de Recherche ainsi décimés, il n’en resterait qu’un seul (Oncologie). En une année, 5 plans sociaux successifs ont effacé 1500 emplois. Du coup, il ne reste, en R&D que 3.500 CDI, sur les 6300 de 2008. L‘hécatombe n’a pas empêché SANOFI de toucher environ 130M€/an au titre du Crédit Impôt Recherche : ces 130 M€ représentent le coût de la destruction, cette année, d’un bâtiment et de son matériel entièrement neufs, à Montpellier, avant d’avoir servi une seule minute. Destruction donc entièrement subventionnée.

SANOFI EXTERNALISE la fabrication de nombreuses molécules très  diversifiées. SANOFI veut ignorer que c’est la Sécurité Sociale en remboursant les médicaments dont, entr’autres, la Cortisone, qui a permis la croissance de cette entreprise, grâce au développement des soins de Santé depuis 1946.  SANOFI feint d’ignorer que ce sont ses chercheurs, ses techniciens qui ont assuré sa dimension économique et sa valeur scientifique. En sacrifiant RECHERCHE et SAVOIR-FAIRE au service du Divin Marché, SANOFI sacrifie l’humain et menace, j’y insiste, l’indépendance médicamenteuse de la France. EXTERNALISATION ET SPECULATION contribuent à la pénurie dans les officines et dans les hôpitaux. Souffrance(s) et mort(s) résultent de cette pénurie organisée dans toute l’Europe qui regarde ailleurs. Vous le savez, mieux que personne, cette pénurie affecte tous les domaines : vaccins, antibiotiques, anti-inflammatoires, anti-parkinsoniens ou anti-diabétiques. Ce bilan complète celui du Médiator, celui de la nouvelle formule du Lévothyrox, celui de la prescription non encadrée, de la Dépakine et celui des flacons de sang contaminés , sciemment vendus en 1989, aux enfants hémophiles irakiens, tous morts aujourd’hui.

Pour conclure :

Le médicament ne peut pas être un bien marchand comme les autres : il doit être libre de droits exclusifs. Il doit être pensé comme un Bien Commun, accessible au plus grand nombre. Il ne peut pas être source de profit pour quelques acteurs capitalistes. Le médicament doit sortir des règles de l’OMC, la notion de propriété intellectuelle appliquée aux  Brevets doit être revue pour changer de paradigme, pour que les intérêts humains majeurs en matière de Santé soient pris en compte.

L’INDUSTRIE PHARMACEUTIQUE DOIT REVENIR A CE QU’ELLE DOIT ÊTRE : UNE INDUSTRIE AU SERVICE DE LA SANTE PUBLIQUE AVEC UNE APPROPRIATION ACTIVE PAR LES CITOYEN(NE)S et LA MAÎTRISE PAR CEUX-CI, DES CHOIX ET ORIENTATIONS DES LABORATOIRES. Nous proposons que soit mis en place des partenariats entre société civile, citoyen(ne)s, élu(e)s, centrés sur les exigences sociales, animés par tous ceux et celles qui se battent et s’inscrivent dans le mouvement de la société.

   Ces CHOIX DOIVENT ÊTRE SOUTENUS PAR UNE VOLONTE POLITIQUE INSTITUTIONNELLE FORTE.

 Mesdames, messieurs je vous remercie au nom de notre Collectif et des centaines de co-signataires du Manifeste

Intervention de M. Morereau, au nom du groupe.

 

 

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